« N’existe-t-il pas un produit à mettre en hiver qui éradique tous les insectes sur les 25 premiers centimètres du sol afin de nous défaire de la mouche de l’olive ?« Cette phrase a été prononcée par un oléiculteur amateur lors d’une formation, à laquelle je participais sur les méthodes, de protection contre la Bactrocera (mouche de l’olive), insecte qui occasionne des pertes considérables dans les oliveraies, et même certaines années, comme en 2014, une récolte nulle dans certains endroits. .
A moins d’utiliser des insecticides puissants et détruire ainsi tout vie souterraine, il semble difficile d’éliminer toute présence de cet insecte sans cause de graves dommages à la nature et… à nous-mêmes !
La nécessité d’une bonne récolte tant qualitative que quantitative oblige de nombreux oléiculteurs à recourir à des produits nocifs. Et s’ils sont en bio, ils mettent en place des méthodes de protection, comme la pulvérisation d’argile sur les olives qui les masquent ainsi du regard des mouches ; leur empreinte carbone est alors parfois désastreuse, en raison des nombreux passages de tracteurs (le masque d’argile est lessivé à partir du où il pleut plus de 25 mm), ce qui est à l’opposé de leur conception de l’agriculture, une agriculture propre. Mais reconnaissons le progrès indéniable de cette méthode comparée à toutes celles qui usent et abusent de pesticides en tout genre…
Un scientifique, Jean Lecomte, ingénieur au CNRS, propose une solution alternative : par une observation minutieuse de la vie de la mouche, de ses prédateurs, il propose de mettre en place dans les oliveraies cette grande loi de la nature : l’équilibre des forces en présence ! Lisez la suite, vous allez comprendre… La biologie de la mouche
La mouche connaît trois stades dans son développement :
– Larve
– Pupe
– Mouche adulte
La mouche adulte, que l’on peut voir entre les mois d’avril et novembre (voire toute l’année si les températures lui sont favorables) pond habituellement dans les olives, la larve se nourrit de leur chair. Puis celle-ci se transforme en pupe qui se métamorphosera en mouche adulte. L’hiver, quand il fait bien froid, les pupes, tombées au sol, se cachent sous la litière en attendant le printemps.
Techniques naturelles de lutte
Jean Lecomte a constaté dans les oliveraies laissées à l’abandon qu’aucune olive n’avaient été touchées par la mouche de l’olive. Quel est donc ce miracle ?
Dans les oliveraies modernes, parfois en agriculture biologique, et par souci de rentabilité souvent, le sol est nu, sans herbe, propre. En conséquence, la mouche de l’olive qui peut parcourir de grandes distances, ne rencontre pas de prédateurs et peut à loisir se reproduire, se multiplier. Alors que dans les oliveraies où les « mauvaises herbes » poussent à foison, ses prédateurs sont pléthores (forficules, staphylins, acariens…) et tous les midis, c’est banquet pour eux !
Notre scientifique recommande cette lutte naturelle en encourageant la plantation de plantes-hôtes bien spécifiques qui accueillent parasites mais surtout parasitoïdes de la mouche. Ces derniers, qui pondent dans ces plantes-hôtes habituellement, pondent aussi, et c’est là que la lutte se joue, sur les olives piquées où a pondu notre fameuse Bactrocera. Alors, un peu plus tard, la larve du parasitoïde se délectera de la larve de la mouche… Et voilà le miracle !Quelles sont donc ces extraordinaires plantes-hôtes principales ?
Elles sont au nombre de cinq :
– La laitue des vigne (Lactuca viminea)
– L’asphodèle rameux (Asphodelus Ramosus)
– La Molène (Verbascum sinuatum)
– L’inule visqueuse (Dittrichia viscosa)
– Le Fenouil (Foeniculum vulgare)
Ces plantes, comme dit précédemment, attirent de nombreux insectes utiles dans la lutte naturelle. Entre autres insectes, de la famille des Eupelmidae, il y a l’Eupelmus confusus, qui pond en général dans la Laitue des vignes, au niveau du capitule exactement, mais aussi dans l’Asphodèle rameux.
A titre d’expérience, j’ai déposé 4 plants d’Asphodèle rameux autour d’un olivier dans un jardin de la cour d’une école dans le centre-ville de Draguignan. Les pépiniéristes des environs n’avaient pu me fournir des autres plantes susdites, la demande n’étant pas encore assez forte…
Cette approche naturelle efficace, dont les résultats ont été vérifiés, met en lumière un point central, capital dans la méthode culturale : il faut accepter la présence dans les oliveraies des « mauvaises herbes », déplaisant au regard, comme un semblant de désordre… Et pourtant, ce désordre apparent est dans la nature la source de l‘équilibre des forces en présence, et dans le cas présent, permet de juguler la pression de la mouche !
Pour en savoir davantage : Lutter contre la mouche de l’olive, Jean Lecomte